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Labrador : Les icebergs… Un nouveau produit d’appel



Fortune Harbour : Paul Langdon de Canoe Hill Adventures.
Fortune Harbour : Paul Langdon de Canoe Hill Adventures.
Texte et photos : Yves Ouellet ----- Après le Rocher-Percé, les baleines, les marées de la baie de Fundy, le Château Frontenac et Anne aux Pignons verts, les icebergs de Terre-Neuve et du Labrador sont-ils en train de devenir un nouveau produit d’appel de calibre international ?
On pourrait presqu’affirmer que ces blocs de glace monumentaux le sont déjà tant ils attirent depuis quelques années une clientèle enthousiaste provenant du monde entier. Lire la première partie du reportage : Labrador, la naissance d'une destination unique

Les icebergs dérivent le long de la côte atlantique depuis des siècles et des millénaires. Ils font partie du paysage printanier coutumier des résidents de la côte de Terre-Neuve et du Labrador depuis toujours sans que cela ait changé grand-chose dans leur vie jusqu’à récemment.
En réalité, ces géants de glace sont demeurés dans l’indifférence générale jusqu’au 14 avril 1912, alors que l’un d’eux heurte le Titanic au large de Terre-Neuve et le fait couler. Depuis, l’attention s’est portée sur les victimes mais, voilà que, plus d’un siècle après, l’iceberg lui-même commence à fasciner les foules.

A Mary's Harbour.
A Mary's Harbour.
Un long voyage
Ce voyageur qui incarne la lenteur jusqu’à l’éternité a parfois entrepris son périple il y a des dizaines de milliers d’années. Coulant millimètre par millimètre dans le cours d’une rivière de glace, à partir du cœur des glaciers du Groenland jusqu’à la mer, il se détache de la langue glaciaire pour entreprendre une errance en mer qui durera plusieurs années elle aussi. Lorsqu’il atteint les côtes du Labrador, de la Basse-Côte-Nord puis de Terre-Neuve, il est en fin d’existence. Il va parfois pénétrer dans les immenses baies du sud du Labrador ou du nord de Terre-Neuve puis s’échouer avant de se désintégrer lentement, de chavirer et de présenter des formes toujours redessinées. C’est là le spectacle que veulent voir les touristes qui convergent depuis tous les continents.

Iceberg watching
L’observation des icebergs, sur des bateaux de mini-croisière, en kayak de mer et même de la terre ferme, permet de découvrir l’incroyable diversité d’aspects, l’audace vertigineuse de formes et la pureté éblouissantes des couleurs de ces mastodontes qui peuvent prendre l’allure de grands navires, de châteaux du Moyen-Âge ou de coquillages démesurés. Autant de structures improvisées qui semblent inertes mais qui vivent et s’expriment dans leurs mouvements imprévisibles et leurs mugissements effrayants.

Comment l’iceberg, en tant que ce qu’on désigne dans le jargon des professionnels de l’industrie touristique comme un « produit d’appel », intervient-il dans l’économie du Labrador, de la Basse-Côte-Nord et de Terre-Neuve ? En suscitant la mise sur pied d’une multitude de petites entreprises là où la situation économique générale est critique.

A St-Anthony.
A St-Anthony.
Des pêcheurs qui se recyclent dans le tourisme comme Tim Rumboldt qui a fondé Cloud 9 Boat Tours dans son petit village labradorien de Mary’s Harbour qui n’est relié à la route que depuis quelques années. Ces nouveaux entrepreneurs espèrent étirer leur saison d’activité de plusieurs semaines puisque la meilleure période pour l’observation des icebergs s’avère être le mois de juin, bien avant le début de la haute saison touristique. Ils comptent aussi y ajouter un produit irrésistible, comme Paul Langdon, de Fortune Harbour, un hameau bien en dehors des sentiers battus (Photo du haut). À sa retraite, Paul a fondé une petite entreprise d’excursions en kayak de mer : Canoe Hill Adventures. L’éventualité de faire du kayak autour ou à proximité des icebergs avec lui séduit déjà des visiteurs européens. Il s’associe à une très agréable auberge du coin, Guillespie House, ajoutant de la sorte aux retombées dans le milieu.

Le Quirpon Island Inn.
Le Quirpon Island Inn.
À Blanc Sablon, Yves Lévesques est concessionnaire d’équipements de loisirs motorisés, Sports Max, et il a ajouté aux nombreuses flèches de son arc des sorties d’observations des icebergs qui complètent un programme d’excursion comprenant les oiseaux et les mammifères marins ainsi que des sites historiques insulaires.

À l’extrême nord-est de l’île de Terre-Neuve, Ed English a profité de la mise en vente des phares et de leurs installations par le Gouvernement fédéral pour acquérir les bâtiments de l’île Quirpon, qui fait près de 6 km de longueur, et y aménager une auberge merveilleusement typique et chaleureuse où se retrouvent autour de la grande table du souper des voyageurs du monde entier venus admirer les icebergs. Son entreprise, Linkum Tours, propose du kayak de mer et des sorties en zodiac pour côtoyer les baleines mais les icebergs font salle comble au Quirpon Lighthouse Inn dès le début juin, un mois avant la saison des baleines.


Twillingate, capitale mondiale des icebergs.
Twillingate, capitale mondiale des icebergs.
Iceberg Alley
Un peu plus au sud, quelques destinations majeures mettent l’emphase sur les icebergs, prolongeant de la sorte la saison touristique de 4 à 6 semaines avant que les mammifères marins ne prennent la relève. Au long du circuit routier nommé Iceberg Alley, les municipalités de St Anthony et, surtout, Twillingate, mènent le bal. En juin, les bateaux d’excursions proposent aux nombreux touristes de se rapprocher des icebergs qui font le pied de grue dans la baie et sur les côtes. Et la clientèle en est ravie. Si jamais un rorqual à bosse vient dresser la queue devant une forteresse de glace, c’est carrément l’apothéose sur les ponts et les caméras se déchaînent.

Twillingate, quant à elle, s’est proclamée « capitale mondiale des icebergs » et toute une armada de petits bateaux de croisière tournaient autour des deux icebergs présents lors de notre passage. Même s’ils étaient magnifiques, l’un d’eux présentant une arche grandiose et fragile, c’était beaucoup d’insistance. Mais, quand l’iceberg est le produit d’appel central, on fait avec ce qu’on a. Comme pour les baleines, le spectacle ne peut pas être mis en scène et rien n’est garanti.


St Lunaire-Griquet.
St Lunaire-Griquet.
Les icebergs sont bien présents sur toute la côte est de Terre-Neuve en juin jusqu’à la mi-juillet et les nombreux chasseurs d’icebergs, dont la photographe Diane Davis (lazydaysnl.wordpress.com) explorent les moindres baies et les villages les plus secrets pour les débusquer. Ce faisant, ils stimulent une économie auparavant léthargique durant cette période de l’année Des jeunes vendeuses de limonade installées au bout du chemin à Elliston, au dépanneur de Fortune Harbour, à la station-service de Trinity, au café de Crow Head et au gîte de St Lunaire-Griquet en passant par les entreprises touristiques les mieux structurées, les compagnies aériennes ou de location automobile, tout le monde profite de cette nouvelle manne qui ne peut que gagner en popularité dans les années qui viennent tant les icebergs émerveillent les voyageurs.

La bière Iceberg de Quidi Vidi.
La bière Iceberg de Quidi Vidi.
Et Tant qu'à faire, goûtez la bière Iceberg, brassée par Quidi Vidi de St John’s, l’excellent rhum et la vodka Iceberg faites avec l’eau cristalline des glaciers…

Croisière vers l’île
Tout voyageur qui se rend à Terre-Neuve par la route doit forcément s’offrir une courte croisière en traversier entre le sud de l’île et la Nouvelle-Écosse. Marine Atlantic offre deux alternatives, soit une navigation plus courte (6 à 8 heures), de North Sydney (Nouvelle-Écosse) vers Port-aux-Basques, au sud-ouest de la province. Ou une traversée entre North-Sydney et Argentia, au sud-est. Cette dernière s’étire sur 16 heures, dont une nuit durant laquelle il est possible de louer une cabine. Le choix s’impose selon la trajectoire projetée sur Terre-Neuve, Port-aux-Basques étant situé au sud du parc national du Gros-Morne alors qu’Argentia se trouve relativement près de St John’s et des principaux attraits. La traversée nocturne est plus dispendieuse mais elle peut permettre de disposer d’une journée de plus et d’éviter un coucher sur la route.

Il faut souligner l’excellence et la grande efficacité du service de Marine Atlantic (marineatlantic.ca/fr) à l’embarquement, à l’accueil et durant la traversée. Les chambres sont d’une propreté irréprochable et les repas sont variés, délicieux et à prix raisonnable.


Lire la suite - A Terre-Neuve : le Fogo Inn, modèle unique de développement

Mardi 23 Août 2016 - 11:06






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