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Entretien avec François Choquette d'Air Canada : « Nous voulons être près des agents de voyages, c'est clair ! »



François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
Par Jean-Pierre Kerten ----- Le directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada, François Choquette, ne manque pas d'enthousiasme quand vient le temps de parler des relations du transporteur avec les agences de voyages du Québec. D'autant plus qu'il coiffe également le chapeau de directeur des ventes loisirs pour le Québec.

Ses responsabilités nationales l'appellent à transiger avec les grandes agences en ligne, les consolidateurs et les grossistes, ainsi qu'avec les programmes de fidélisation des grandes banques, le programme Air Miles et autres. Mais une de ses principales préoccupations du moment c'est de mieux comprendre le réseau de distribution et ses acteurs au Québec afin de pouvoir fournir, avec son équipe, le support le mieux adapté possible en fonction des diverses situations rencontrées. Il s'est montré très optimiste pour l'avenir lors de l'entretien qu'il nous a accordé la semaine dernière .

Évoquant l'historique du transporteur, il a rappelé qu'Air Canada avait connu une décennie difficile avec, notamment, la fusion en 1999 avec Canadien, puis la crise du Sras et autres calamités qui ont mis à mal la compagnie et durant laquelle les ressources étaient limitées.

« Il n'y avait quasiment plus d'investissements, la compagnie s'était un peu recroquevillée sur elle-même pour tenter de survivre et on avait recentré les équipes commerciales dans les bureaux. On ne voulait plus qu'elles sortent », raconte François Choquette. « Et, comme beaucoup d'entreprises, nous avions pris le virage du web. Il fut un temps où on voyait les agents plutôt comme un centre de coût qu’une opportunité de ventes et où on pensait que distribuer via Internet c'était gratuit. Aujourd'hui on s'est rendu compte qu’attirer les clients par le biais du e-commerce peut coûter cher et demande une expertise pointue qu’il est nécessaire de maitriser. De plus, on réalise maintenant que les voyageurs utilisent des canaux (B2B vs B2C) différents selon les circonstances et les besoins. Les consommateurs avertis sont tout à fait disposés à rémunérer un service dès lorsqu’ils percoivent la valeur ajoutée que peut leur procurer un agent de voyages. D'ailleurs, même la génération des milléniaux, qu’on dit accros aux nouvelles technologies, sont disposés à faire affaire avec un agent de voyage pour l’organisation de séjours complexes car ils comprennent bien ce qu’un spécialiste peut apporter comme expertise. La stratégie 'en direct' est importante mais elle ne peut pas se faire au détriment du BtoB. Cela dit, autant pour les agents de voyages que pour les tour opérateurs il ne faut pas perdre de vue les attentes des clients et arrimer nos offres en fonction de celles-ci. »

François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
Parlant du Air Canada d'aujourd'hui, François Choquette n'a que l'embarras du choix pour illustrer les revirements positifs avec, notamment, l'avènement de la filiale Air Canada Rouge et la mise en service de nouveaux Boeing 787 Dreamliner qui permettent de desservir des destinations nouvelles ou existantes avec une meilleure assurance qu'elles seront rentables. Il y a aussi les ententes de 10 ans signées avec les pilotes et les agents de bord. Les choses ont bien changé.

« Nous sommes en train de changer la culture d’Air Canada parfois encore perçue - à tort puisque nous sommes une compagnie 100% privée depuis 1989 - comme une société d'état. Nous sommes sortis de la période difficile et on commence à avoir une compagnie normale à tous les niveaux », observe François Choquette. « La rentabilité amène une spirale positive et tout le monde est positif ! Nous avons accès a davantage de ressources et il faut les employer, que ce soit pour la formation ou le développement du personnel, ou pour des incitatifs. Nous sommes enfin en mesure de croitre ! Et compte tenu de sa taille, un Air Canada qui va bien, c'est bon pour tout le monde ! »

Et donc, bon également pour le Québec, constate François Choquette qui tient à rappeler l'importance qu'ont Montréal et le Québec pour le transporteur.

« Il est vrai qu'en l'absence d'avoir une bonne visibilité au centre-ville, comme un immeuble emblématique, par exemple, on peut facilement oublier que notre siège social est ici et que c'est ici que les décisions stratégiques sont prises. Cela dit, notre président, Calin Rovinescu, a clairement défini que la plaque tournante principale d'Air Canada c'est Toronto et que Vancouver constitue la porte vers l'Asie et Montréal, la porte vers la francophonie à travers le monde. »

Une porte mais aussi une plaque tournante car, en plus de multiplier les destinations qu'elle dessert en vol direct depuis Montréal, avec des ajouts récents comme Bruxelles, Genève ou Nice et le lancement annoncé de Lyon et Casablanca, Air Canada ajoute beaucoup de vols ou de fréquences vers les États-Unis avec quinze villes importantes aujourd'hui desservies en vol direct. (Auxquelles viennent s'ajouter Denver, Houston et Philadelphie annoncés la semaine dernière).

« L'ampleur de nos services sur les États-Unis a pour effet de rendre Montréal très attractive, notamment sur le plan des congrès, et si nous offrons des fréquences importantes comme, par exemple, nos 4 vols quotidiens de Montréal sur Los Angeles, c'est aussi pour alimenter nos dessertes européennes au départ de Montréal qui agit dès lors comme une importante plaque tournante », explique François Choquette. « En fait, il existe une maturité certaine dans la manière dont nous traitons maintenant notre réseau. Et L'aéroport de Montréal est loin d'être moribond, comme en témoigne également la venue de China Airlines, un partenaire dans Sar Alliance avec lequel nous travaillons étroitement. Tout cela est positif pour le Québec et est porteur d'opportunités de développement pour les agents de voyages du Québec. »

Et avec un changement de culture bien affiché et un avenir très prometteur, Air Canada tient à renforcer son partenariat avec le réseau de distribution. Mais l'un des défis à relever pour le service des ventes c'est de bien appréhender les différents processus et modèles d'affaires du réseau de distribution, estime François Choquette.

«Autrefois, pour émettre un billet d'avion, toutes les agences devaient être IATA, rappelle-t-il. Maintenant il y a beaucoup moins d'agences IATA et plus d'agences qui impartissent la billetterie à des agences qui en font une spécialité comme, les consolidateurs. C’est une bonne méthode mais ça nous pose un défi au niveau de la gestion appropriée de notre relation client. Nous sommes là pour accompagner les agences dans leur développement, un peu comme une banque des PME. Mais pour cela, il faut comprendre quelles sont les agences qui en amont achètent des billets Air Canada. Cette information est primordiale pour nous afin de comprendre les enjeux et les attentes des agences et de leurs clients ultimes et développer des produits appropriés. Pour l'instant, nous n'avons traité qu'avec des agences ayant une licence IATA mais nous essayons de nous ouvrir aux autres agences qui réservent par divers canaux. D'autres phénomènes comme les agents extérieurs - en grand nombre dans certaines agences - les groupistes, les apporteurs d'affaires, retiennent notre attention. Nous voulons mieux comprendre tout cela, afin de transformer nos outils commerciaux en les adaptant aux nouvelles réalités du marché. »

François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
François Choquette, directeur national des ventes spécialisées d'Air Canada et directeur des ventes 'loisir' pour le Québec
« Nous voulons être près des agents, c'est clair ! Nous avons quatre représentants sur la route, sans compter l'équipe de Vacances Air Canada, qui nous représente aussi et réciproquement, et nous sommes intéressés à discuter avec toutes les agences du Québec. Il faut qu'elles sachent que pour soutenir la croissance prévue dans les prochaines années, nous sommes là plus que jamais pour leur permettre d'avancer, de se développer et de faire preuve de créativité. Et plus les agents vont nous accompagner, comme ils ont pu le faire avec d'autres dans le passé, plus nous allons pouvoir créer pour eux de nouvelles opportunités. Nous voulons avoir une relation d'affaires avec les agences, être capable de les appeler et de faire valoir nos promotions et les avantages de nos services, quel que soit leur profil. Ainsi, nous aurons fait notre travail de mise en marché et, en retour, les agences auront établi une relation avec nous et obtiendront un meilleur support. Nous aurons sous peu des ressources pour les agences qui viennent nous voir avec des projets créatifs. »

Lorsqu'on demande à François Choquette comment il voit l'agent de voyage idéal, il insiste sur l'importance de la connaissance des produits.

« On peut parfois avoir l'image d'une profession vieillissante, mais nombreux sont les agents qui ont pris le virage technologique, qui ont un chiffre d’affaires en croissance et qui ont développé un créneau amenant de la valeur ajoutée. Selon mon humble analyse, le voyage a attiré au départ des gens plutôt émotifs, passionnés des cultures et des voyages, mais cela vient quelques fois en contradiction avec le modèle d’une entreprise qui se doit d’être rentable par vocation. Aujourd’hui, le monde du voyage est transformé par des gens d’affaires qui se joignent à notre industrie en provenance d’autres secteurs économiques et qui par ricochet entrainent des nouvelles façons de faire. Mais si il y a une chose que nous souhaitons voir chez un agent de voyage c'est bien qu'il connaisse nos produits . Nous avons à cette fin mis en ligne avec l' ACTA un programme de certification. Nous voudrions que les agents connaissent bien les services offerts ainsi que leurs avantages. Cela passe autant par la connaissance des services payants ou offerts gratuitement, des différentes classes de service et des salons aux aéroports, que par celle des différents types d'appareils, du programme Aéroplan, et de toute une quantité de d'éléments de services qui sont importants à connaître pour bien vendre Air Canada. Par exemple, sur Vancouver nous exploitons deux fois par jour un avion widebody (B767 ou A330) avec une classe affaires internationale. Bien sûr, ce produit n’a pas d’égal sur le marché et nous le vendons plus cher. Nous n'avons pas honte de le dire et nous avons besoin que l’agent puisse faire valoir les avantages de ce service par rapport à un court courrier de nos concurrents par exemple. Je dirais la même chose pour notre terminal à Paris. Toute comparaison utile, le terminal 2A de CDG-Roissy où nous sommes installés, est bien plus pratique que les autres pour les voyageurs. Mais il faut être capable d'expliquer pourquoi! Tout cela est très important et nous avons encore beaucoup à faire pour expliquer nos produits car ils sont complexes. Cela dit, la perception de nos produits, elle, s'améliore. »

Un autre défi qui attend François Choquette, c'est le nouveau service à l'année sur Lyon qui débutera en juin 2016 à raison de (jusqu'à) 5 vols par semaine.

« Je prends très à cœur cette nouvelle destination, Lyon, car il y a beaucoup à faire et les réservations ne vont pas rentrer toutes seules. Durant les années difficiles, nous avons fait le minimum sur la France, nous n’avons pas pris la place qui nous revient et les autres transporteurs se sont imposés. Pendant longtemps nous n'avions que Paris avec un vol par jour et nous essayions de survivre. Lyon, est la deuxième ville de France sur le plan économique mais ce n'est pas un marché qui est naturel comme peut l'être Nice que nous avons débuté en vols saisonniers avec Rouge, il y a trois ans . Nous prenons un risque calculé avec Lyon mais heureusement, il y a beaucoup plus de Français qu'avant à Montréal et beaucoup s'envolent pour Paris et puis prennent le train pour se rendre à Lyon. Nous allons devoir développer ce marché et le stimuler. »

Une chose est sûre, le moment est propice pour nouer des liens solides avec Air Canada !

Lundi 23 Novembre 2015 - 16:56






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